Georges Dumézil (1898-1986) : Religion proto-indo-européenne et mythologie comparée. Georges Dumézil a mené un ensemble d’études comparatives des textes les plus anciens des mythologies et des religions des peuples d’Europe et d’Asie centrale dits indo-européens au niveau linguistique. Son hypothèse de l’existence d’une religion proto-indo-européenne repose sur l’idée d’une unité originelle de l’ensemble des mythes et divinités associés aux locuteurs de ces langues. Il ne subsiste toutefois aucun témoignage écrit d’un tel système de croyance, les Proto-Indo-Européens étant un peuple sans écriture. Ses recherches en mythologie comparée ont donc cherché à reconstituer ces croyances en supposant qu’elles auraient survécu dans les traditions ultérieures des peuples de cette diaspora. Elles ont principalement concerné les mythologies indo-iranienne, baltes, romaines, nordiques, celtiques, grecques, slaves, hittites, arméniennes, illyriennes, et albanaises.
Biographie. Georges Dumézil est élève en khâgne au lycée Louis-le-Grand. Il rencontre alors le philologue Michel Bréal, traducteur de l’œuvre de Franz Bopp, fondateur de la grammaire comparée et auteur d’ouvrages sur le vocabulaire des langues indo-européennes. Celui-ci le recommande à son successeur Antoine Meillet, un autre grand linguiste, et lui donne son dictionnaire sanskrit-français. Avant d’être reçu à l’École normale supérieure en 1916, Dumézil apprend aussi l’arabe. En sortant du lycée, il connaît donc déjà six langues, dont trois langues anciennes. Après la guerre, il part comme lecteur de français à l’université de Varsovie et rentre en France en 1922 pour commencer ses thèses d’histoire des religions et de mythologie comparée. En 1925, il part pour la Turquie et enseigne l’histoire des religions à l’université d’Istanbul, créée par Atatürk. Il apprend le turc, puis voyage dans le Caucase et en Russie, où il découvre notamment la langue et la mythologie des ossètes. Il étudie également la langue des Oubykh, un peuple caucasien réfugié dans l’Ouest de la Turquie, ainsi que le tcherkesse et l’abkhaze. Le fonds d’ouvrages qu’il rapporte de ces voyages est l’un des plus importants de caucasologie en Occident. En 1931, il obtient un poste de lecteur de français à l’université d’Uppsala, en Suède. Il y parfait sa connaissance de la mythologie scandinave, et en profite pour apprendre une nouvelle langue. Il est ensuite nommé directeur d’étude comparative des religions des peuples indo-européens à la Ve section de l’École pratique des hautes études. Il suit également les cours de sinologie donnés par Marcel Granet et fréquente Marcel Mauss. En 1949, il est élu au Collège de France et enseigne à la chaire des civilisations indo-européennes créée pour lui. Il voyage aussi au Pérou et apprend le quechua et dans le Caucase pour y étudier les langues et les mythologies. Il prend sa retraite en 1968 et publie les trois volumes de Mythe et Épopée. En 1970, il est élu à l’Académie des inscriptions et belles-lettres et entre à l’Académie française en 1978. Source Wikipedia
La théorie des trois fonctions. L’un des apports majeurs de Georges Dumézil à la théorie des survivances est celle de l’existence d’un système de trois fonctions communes à l’ensemble des peuples indo-européens. Dumézil a cherché pour cela à mettre en évidence l’existence de structures narratives similaires relatives à une conception de la société organisée selon lui autour de la fonction du sacré et de la souveraineté, la fonction guerrière et la fonction de production et de reproduction. La fonction de souveraineté, d’ordre magico-religieux, serait incarnée par la caste sacerdotale. La fonction militaire, celle de la caste guerrière, se refléterait dans les divinités de la guerre. La troisième fonction, incarnée par la caste des éleveurs-cultivateurs, se caractériserait par la fertilité, la subsistance, et divers personnages mythiques associés aux plantes et aux animaux. Cette organisation trifonctionnelle se retrouverait aussi bien dans la mythologie et les récits fondateurs de la Grèce et de la Rome antique, et dans les institutions sociales comme celles du système de castes en Inde.
Repères bibliographiques
Un grand nombre d’universitaires a repris les thèmes développés par Georges Dumézil, parmi lesquels :
Georges Duby, qui a étudié la continuité des trois fonctions clergé, noblesse et tiers état au Moyen Âge avec Les trois ordres ou l’imaginaire du féodalisme (1978) et Le Chevalier, la Femme et le Prêtre (1981)
Michel Foucault, qui a bénéficié du patronage de Dumézil s’est inspiré de ses recherches dans ses premiers travaux.
Le spécialiste du monde celtique Christian-J. Guyonvarc’h
L’’indianiste français Louis Renou
Le linguiste et mythologue néerlandais Jan de Vries (1890-1964)
Le linguiste français Émile Benveniste
Le philosophe et rhétoricien français Philippe-Joseph Salazar
L’indianiste suédois Stig Wikander (1908-1983)
Les indianistes Jean Naudou, Nick J. Allen, Daniel Dubuisson admettent l’utilité des thèses trifonctionnelles dans leur domaine, tout comme Émilia Masson dans le sien, les Hittites.